
Propos recueillis par Bruno Tontodonati
Q1 : Bonjour Johann, pourrais-tu nous parler un peu de toi, de tes origines et de ton parcours professionnel ?
Je suis né à Paris en France en 1978, et j’ai grandi en région parisienne jusqu’à l’âge de huit ans. Pour des raisons professionnelles du côté de mon père, ma famille et moi avons déménagé dans l’Ouest de la France avant de finalement partir vivre en Haute Savoie où je suis resté jusqu’à la fin du lycée.
C’est à l’âge de dix-huit ans que je suis arrivé en Suisse pour aller étudier à l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) jusqu’à mes vingt-sept ans. Étirer mes études sur une plus longue période m’a permis de concilier deux sports de haut niveau, soit le soccer et le tennis de table, et de compléter en parallèle un master à Sofia-Antipolis.
En 2005, une fois mon diplôme d’ingénieur en poche – en système de communication et réseau avec une spécialité dans les technologies web -, je suis rentré dans le monde du travail. J’ai été rapidement approché par quelques grandes entreprises qui m’ont proposé des postes où j’ai eu l’impression de n’être qu’un numéro parmi des milliers d’autres dans leur organisation. C’est également à cette époque que j’ai eu la chance de rencontrer Philippe Rey-Gorrez, le président de TeamWork, basé à Genève. Ce fût pour moi un véritable coup de foudre professionnel. Durant mon entrevue d’embauche, nous avons passé un peu de temps sur mon parcours et le reste à parler de voile, de montagne et de sport et c’est ainsi que tout naturellement j’ai signé mon contrat à la fin de cette entrevue.
J’ai donc débuté ma carrière chez TeamWork en 2006. À l’époque nous étions encore une quarantaine de personnes dont une trentaine en Suisse, avec un premier bureau que nous venions d’ouvrir à Lyon. J’ai commencé en tant que consultant SAP sans vraiment savoir ce que c’était. Je suis rentré dans le monde de SAP par la petite fenêtre des premiers outils web qui reposaient sur le langage de programmation Java que j’avais étudié à l’EPFL. SAP connaîtra par la suite une ascension fulgurante dans le domaine de systèmes de gestion intégrés. Après quelques années en tant que consultant, j’ai pris la responsabilité du pôle Nouvelles Technologies de 2009 à 2013. En l’espace de quatre ans, mon équipe est passée de cinq à plus de quinze personnes.
C’est en 2013 qu’avec ma conjointe nous avons eu envie de partir vivre de nouvelles aventures et de sortir de l’Europe pour rencontrer des mentalités complètement différentes. Nous avons hésité entre plusieurs pays mais le Canada ressortait très fortement car nous voulions garder une certaine proximité avec notre famille restée en France et en Suisse. Le Canada, c’est aussi une porte d’entrée en Amérique du Nord où l’on parle français, avec un marché potentiel intéressant pour TeamWork. Je suis donc aller voir Philippe Rey-Gorrez, le Président de TeamWork pour lui expliquer à la fois mon projet de vie à Montréal et mon désir de continuer de grandir dans cette compagnie extraordinaire. C’est ainsi que nous avons convenu de créer TeamWork Canada.
TeamWork Canada est donc née en 2014. Je l’ai co-créé avec l’un des directeurs de l’équipe suisse, Eric Beauxerois, qui a décidé lui aussi de partir s’installer à Montréal dans la foulée de mon départ. Eric est un homme de grande expérience qui a notamment dirigé l’équipe de 120 personnes de TeamWork Genève pendant quasiment dix ans et qui m’a beaucoup aidé afin de bien structurer la compagnie au Canada.
Aujourd’hui TeamWork Canada c’est un peu plus d’une cinquantaine de personnes. Même si c’est un marché où l’on parle français, il nous a fallu du temps pour s’insérer dans les réseaux en place et acquérir de l’expérience localement. On a donc choisi de travailler avec des partenaires locaux pour entrer dans le marché et bâtir notre réputation qui place la qualité du service rendu au-dessus de tout. Aujourd’hui nous couvrons la plupart des domaines d’activité, de la PME jusqu’à la multinationale. Beaucoup de nos clients sont des PME au Québec, et nous avons aussi un hub spécialisé dans le bio Tech et le pharma pour couvrir la grande région de Boston.
Notre grande force chez TeamWork Canada, c’est notre capacité à bien conseiller le client à partir de toute notre expérience et des bonnes pratiques que nous avons pu développer auprès de grands comptes à l’international, que ce soit en Asie, en Europe, ou dans le reste de l’Amérique du Nord. Nos concurrents n’ont pas nécessairement cette même approche conseil. Pour nous, au-delà de livrer les attentes du client, nous avons à cœur de s’assurer qu’il mette en place la solution la plus adaptée à ses besoins. Une fois l’intégration terminée, on forme également leurs équipes pour les rendre le plus autonome possible.

Q2 : Qu’est-ce qui t’a amené à rejoindre la Chambre de Commerce Canado Suisse du Québec ?
En arrivant au Canada, je me suis senti un peu déraciné et j’ai eu besoin de retrouver un peu ce sentiment de communauté, autant du côté personnel que professionnel. La Chambre de Commerce allie ces deux aspects. Assez vite on devient ami avec les gens que l’on rencontre lors des événements. C’est quelque chose de vraiment agréable qui me fait sentir presque comme à la maison. Et au niveau professionnel, les événements me permettent de développer mon réseau d’affaires.
C’est aussi ce besoin d’ancrage qui m’a donné envie de prendre la présidence de l’association des alumni de l’EPFL au Canada et de redonner à cette école qui m’a tant donné. Aujourd’hui nous sommes plus de 150 alumni de l’EPFL dans la grande région de Montréal et plus de 200 à travers le Canada.

Q3 : Quels conseils donnerais-tu à des gens d’affaires qui viennent s’installer au Québec ?
Montréal International a été d’un grand soutien dans mon parcours. Ils aident beaucoup à l’implantation, ils offrent des formations sur l’immigration et sur plein d’autres sujets qui peuvent aider une compagnie à trouver les bonnes ressources pour débuter du bon pied. Le Swiss Business Hub pour les entrepreneurs peut également beaucoup aider, de même que le Consulat général de Suisse à Montréal. Ne pas sous-estimer le fait que malgré une langue commune, le Français, c’est un marché différent de la France ou la Suisse et que c’est à nous de nous adapter en grande partie sans nous dénaturer. Et finalement faire une priorité de se rapprocher des communautés comme celle de la Chambre de Commerce pour se créer des contacts très rapidement.

Q4 : Pour revenir un peu sur le sujet de cette édition de l’Info Suisse, qu’est-ce qui t’inspire dans l’avenir du virtuel ?
Le virtuel est un domaine très vaste. Ce qui m’intéresse le plus, c’est de découvrir les nouvelles applications qui viendront aider l’humanité. Je vois notamment des concepts très intéressants émerger dans le monde de la simulation et de l’entraînement. Par exemple dans le domaine de la médecine pour simuler des opérations et permettre à des médecins de peaufiner leurs techniques, de l’aéronautique en simulant des vols en immersion totale ou encore dans le domaine de la culture avec des visites de musées en réalité virtuelle ou en réalité augmentée. J’espère cependant que la réalité virtuelle dans les jeux vidéo ne viendra pas renfermer davantage les gens sur eux-mêmes, ces simulations deviennent tellement réalistes qu’il ne faut pas tomber dans l’excès et continuer de bien vivre aussi dans le réel.
Dans le domaine industriel, il y a aussi des nouvelles applications intéressantes à aller chercher. Par exemple, dans la gestion des entrepôts, les lunettes en réalité augmentée de Google permettent de connaître les niveaux de stock d’un produit directement en le regardant sur l’étagère.
Bref, c’est un vaste domaine aux nombreuses applications possibles.
Q5 : Pour terminer, es-tu plutôt fondue ou raclette ?
Sans hésiter fondue ! Bien que j’adore aussi la raclette. Ayant beaucoup vécu en Haute Savoie, on a la fondue savoyarde, qui est un mélange de Gruyère, de Comté et d’Emmental. Mais en arrivant en Suisse, j’ai goûté à la fondue suisse qui est moitié Gruyère des Grottes et moitié Vacherin fribourgeois, je suis tombé en amour! Je pourrais en manger tous les mois de l’année sans problème.
Bio Johann Marty
CEO Teamwork Canada, entreprise de services informatiques travaillant entre autres avec des clients dans le commerce de détail. Membre du conseil d’administration de la Chambre de Commerce Canado-Suisse et président des Alumnis de l’EPFL à Montréal.